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Nicomedes Santa Cruz

« Tout cela a généré de la haine en moi, contre ces silences, et plus tard j’ai pris conscience de la tâche que je devais accomplir, qui peut être accomplie en utilisant la poésie comme dénonciation. »

Nicomedes à propos de l’invisibilité des afro-péruviens dans l’histoire du Pérou.

Nicomedes Santa Cruz Gamarra est né à Lima le 4 juin 1925 dans le quartier de La Victoria de Lima et mort le 5 février 1992. A l’instar de sa sœur Victoria Santa Cruz, il est connu pour la lutte envers la reconnaissance de la culture afro-péruvienne. En effet, il est le premier poète à aborder et à souligner la place et la contribution des afro-péruviens dans l' Histoire du Pérou.

Il était le neuvième des 10 enfants qu’ont eu Nicomedes Santa Cruz Aparicio et Victoria Gamarra Ramirez. Son père était un dramaturge, passionné de littérature et de musique, qui avait vécu aux États-Unis entre 1881 et 1908, où il avait suivi une formation d’électricien et de mécanicien et avait appris plusieurs langues.

 

Dans son enfance, Nicomedes passait son temps avec un enfant plus âgé du nom de Pilade. Ce dernier, chantait en strophe de dix lignes ce qui prédisposa Nicomedes pour sa carrière. Malheureusement, cet ami Pilade mourut en 1930. Lorsqu’il arriva à la fin l’école primaire, Nicomedes devint apprenti forgeron, et, parallèlement, il se mit à écrire de la poésie, notamment sur les papiers dont il disposait pour dessiner les plans des projets de forgeron.

En 1945, alors qu’il avait 21 ans, il rencontra Don Porfirio Vásquez qui influença sa carrière et ses œuvres. Carlos Porfirio Vásquez (né le 4 novembre 1902 et mort le 26 septembre 1971), était surnommé El Patriarca de la Música Negra, il était guitariste, chanteur, danseur, ou encore décimiste péruvien. La décima désigne une forme de poésie de la tradition péruvienne composée de strophes de dix vers. Elle est rarement accompagnée de musique et aborde une variété de sujets.

 

En 1954, Nicomedes quitta définitivement son travail de forgeron. Il voyagea à travers le Pérou pour partager les textes qu’il avait écrit. Quand il retourna à Lima, il rejoignit la compagnie musicale Pancho Fierro, qui sera connue plus tard comme « Ritmos Negro del Peru » (Rythmes noirs du Pérou). Avec sa sœur Victoria Santa Cruz, il créa la première compagnie de théâtre noire au Pérou, en 1958. Après cela, Nicomedes, s’essaya aux métiers de la radio, de la télévision mais aussi à l’écriture et à la musique.

Entre les années 1960 et 1970, il se consacra à l’écriture. Il publia quatre recueils de poèmes : Décimas (1960), Cumanana (1964), Canto a mi Perú (1966), Ritmos negros del Perú (1971), deux anthologies : Antología: Décimas y poemas (1971) et Rimactampu: Rimas al Rímac (1972), et des nouvelles. Il a aussi écrit de nombreux articles dans des journaux et magazines de la capitale péruvienne : El Comercio, Caretas et Expreso. Dans ses écrits, il essayait de transmettre les coutumes, traditions, et histoire de la culture afro-péruvienne. Cela constitue un véritable héritage culturel. Par exemple, dans un journal, il écrivit une chronique intitulée « Folflore costeño » (Folklore côtier) dedans, il expliqua dans les détails quels instruments étaient utilisés pour interpréter la musique traditionnelle afro-péruvienne, il fit également une description des danses comme el son de los diablos, el festejo, el alcatraz et el ingá. C’est notamment grâce à cette contribution qu’aujourd’hui, nous avons des connaissance sur le folklore côtier afro-péruvien.

 

Nicomedes a permis de faire revivre le folklore afro-péruvien qui avait frôlé l’extinction. En effet, ses écrits ont permis de mettre en lumière, l’histoire des Afro-péruviens dans une société de l’époque qui, bien ayant aboli l’esclavage un siècle auparavant, était toujours raciste. Les personnes noires étaient considérées comme inférieures. Il dénonçait ainsi: la marginalisation de l’Indien, le racisme, l’impérialisme, la colonisation.

Il devint pour le reste de sa vie, une voix qui portait la lutte de la reconnaissance de l’identité afro-péruvienne à travers le monde, il fit des conférences internationales sur ce sujet : au Mexique, à Cuba, au Chili, en Colombie, au Panama, au Sénégal et au Japon. A la fin de 1980, Nicomèdes quitta le Pérou afin de s’installer en Espagne. C’est là-bas qu’il termina l’une de ses œuvres les plus importantes, La décima en el Perú. La même année, il rédigea une émission culturelle pour la radio publique internationale espagnole. Il s’investit également dans les évènements liés à la commémoration du Quincentennial de l’arrivée de Christophe Colomb sur le continent américain. Il mourut en Espagne, à Madrid le 5 février 1992 d’un cancer du poumon.

Son empreinte est tellement importante que le 4 juin, la date de sa naissance, est aujourd’hui surnommé « el Dia de la cultura Afroperuana » (le jour de la Culture Afroperuvienne )au Pérou. Ses œuvres, que ce soit sa poésie et sa musique ont conduit à la reconnaissance de l’identité Afro-Péruviennes et de leur culture.

Ritmos negros del peruNicomedes Santa Cruz
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Ritmos negros del Perú, qui évoque la traite négrière au Pérou :

Ritmos de la esclavitud
Contra amarguras y penas.
Al compás de las cadenas
Ritmos negros del Perú.

De África llegó mi abuela
vestida con caracoles,
la trajeron lo` epañoles
en un barco carabela.
La marcaron con candela,
la carimba fue su cruz.
Y en América del Sur
al golpe de sus dolores
dieron los negros tambores
ritmos de la esclavitud

Por una moneda sola
la revendieron en Lima
y en la Hacienda “La Molina”
sirvió a la gente española.
Con otros negros de Angola
ganaron por sus faenas
zancudos para sus venas
para dormir duro suelo
y naíta`e consuelo
contra amarguras y penas…

En la plantación de caña
nació el triste socavón,
en el trapiche de ron
el negro cantó la zaña.
El machete y la guadaña
curtió sus manos morenas;
y los indios con sus quenas
y el negro con tamborete
cantaron su triste suerte
al compás de las cadenas.

Murieron los negros viejos
pero entre la caña seca
se escucha su zamacueca
y el panalivio muy lejos.
Y se escuchan los festejos
que cantó en su juventud.
De Cañete a Tombuctú,
De Chancay a Mozambique
llevan sus claros repiques
ritmos negros del Perú.

Rythmes de l’esclavage
Contre l’amertume et les peines
Au son des chaînes
Les rythmes noirs du Pérou

D’Afrique vint ma grand-mère
Vêtue de coquillages
Les Espagnols l’emmenèrent
Dans une caravelle
Ils l’ont marqué avec une bougie
La carimba fut sa croix
Et en Amérique du Sud
Au battement de ses douleurs
Les tambours noirs donnèrent
Les rythmes de l’esclavage

Pour une pièce seulement
Ils la revendirent à Lima
A la ferme de La Molina
Elle servit des Espagnols
Et avec d’autres Noirs d’Angola
Elle gagna pour son labeur
Des moustiques pour ses veines
Pour dormir, le sol dur
Et rien comme réconfort
Contre l’amertume et les peines

Dans la plantation de cannes à sucre
Est né le triste sacavón
Dans le trapiche de rhum
Le Noir a chanté la Zaña
La machette et la faux
Tannèrent ses mains noires
et les Indiens avec leurs quenas
le Noir avec son tamborete
ont chanté leur triste sort
Au son des chaînes

Les vieux Noirs sont morts
mais entre les cannes sèches
On écoute leur zamacueca
Et le panalivio lointain
Et on écoute les festejos
Qu’on chanta dans leur jeunesse
De Cañete à Tombouctou
De Chancay au Mozambique
Ils apportent leurs tambourinements clairs
Les rythmes noirs du Pérou

Publié en mars 2022

Article par : Taheera, bénévole de l'association.

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